Le trône du dieu souverain germanique
Dans la mythologie germanique et scandinave, le dieu souverain Odin (ou Wodan dans sa forme continentale) est représenté sur un trône. Celui-ci se nomme Hlidhskjalf. L’étymologie du mot norrois peut nous éclairer sur la fonction du dieu. Régis Boyer le rapproche du verbe skjalfa, signifiant trembler. On pourrait associer ce mot au tremblement du sorcier/chaman quand il officie un rite et qu’il est pris de transe. D’ailleurs, on sait déjà que le culte odinique a toujours un rapport avec la pratique de la magie. Odin a, parmi ses attributs et fonctions, le pouvoir de provoquer la fureur sacrée. Le siège sur lequel il officie serait donc une image de son extase rituelle.
Boyer évoque également le rapprochement avec une traduction probable qui serait celle de « pente à degrés ». Le trône pourrait ainsi symboliser un axe à niveaux comme peut l’être le pilier de la yourte du chaman nordique. Ce poteau central symbolise l’axe du monde et est gravé de neuf encoches. On l’attribue volontiers au frêne Yggdrasil soutenant les neuf mondes dans la mythologie germano-scandinave.
Familier de la polymorphie des kenningar, il n’est pas extravagant de considérer que le terme Hlidhskjalf représente une double image du trône du dieu souverain germanique. Tel un entrelac gravé dans le bois, l’image du trône apparaît avec deux sens complémentaires et qui vont parfaitement bien à la fonction et à l’histoire même du dieu. Ainsi, se laissant porter par ses images expressives et parlantes, on accède plus facilement au sens profond du culte dédié à la divinité. La puissance des images parle mieux que n’importe quelle analyse.