La force du poème de louange
Dans la saga islandaise de Njall le Brûlé, il est fait mention d’un combat héroïque entre Gunnar et plusieurs dizaines d’hommes (dont le nombre varie selon les manuscrits). Haukr Valdisarson a composé une « drapa » en sa mémoire, c’est à dire un poème de louange. Ce type de texte est récurrent dans les sagas islandaises et devait sans doute être chanté :
» Bellement se défendit
Gunnar contre les arbustes
De l’enclos de Göndul,
Mais Gizurr attaqua le champion
D’une excessive ardeur ;
Le Njördr de la pluie des glaives
Blessa seize arbres du vacarme des lances
(Rudement joua l’homme avec les fléaux)
Et en tua deux. »
Comme le style de la drapa l’exige, on trouve beaucoup de kenningar dans ce valeureux chant :
» Les arbustes de l’enclos de Göndul « représentent les guerriers.
» Le Njördr de la pluie des glaives « est une image pour le héros Gunnar.
De même, la métaphore les « arbres du vacarme des lances « fait référence aux combattants armés.
Ainsi la foison d’expressions savantes pour honorer les braves devait représenter un style prisé à l’époque. L’abondance de ces images permettait à un auditoire de garder en mémoire la geste du guerrier. Une fois de plus, on constate combien l’idéal de bravoure et de courage dans le combat fut exalté à travers ces chants magnifiques.
Un autre scalde (poète), Thormodr Olafsson, résume parfaitement bien l’intérêt porté à ce genre de louanges, en faisant référence au même Gunnar :
» Nul dispensateur du soleil
Du monde des sables
Ne fut plus vaillant en Islande
Aux temps païens que Gunnar ;
il convient de le louer… »