Les kenningar dans l’épopée
Dans la saga islandaise dédiée à Grettir, un poème épique attire l’attention tant son élaboration est savante.
Après avoir combattu et vaincu un guerrier ours (ou « berserkr », voir à ce sujet La métaphore de la transe chez les Vikings , Le totémisme comme symbole des clans celtiques, L’origine de l’association de l’ours à la fonction royale…) Grettir déclame une visa qui prend cette forme :
« La bosse du combat
Du fervent de la bataille
Sur quoi j’appuyai l’épine de ma cheville
S’enfonça dans la porte à vivres de Snaekollr ;
Ainsi fendit en deux
Le terrain de sa denture
Le mur bardé de fer du passage des dards
Que les mâchoires lui tombèrent sur la poitrine. »
Avant de trouver le sens des kenningar du poème, il est bon de rappeler que le héros a terrassé le guerrier ours prénommé Snaekollr en lui enfonçant le bouclier dans la bouche, ce qui a provoqué l’arrachement de son maxillaire inférieur.
Ainsi, l’expression « fervent de la bataille » désigne le guerrier.
« La bosse du combat » est sans doute le bouclier et son umbo (pièce ronde métallique et concave au centre).
« L’épine de la cheville » représente le pied. Grettir s’en sert pour asséner son coup fatal.
« La porte à vivres » désigne la bouche !
« Le terrain de la denture » est une formule pour le visage ainsi que le « mur bardé de fer » (parce que recouvert du casque).
Les kenningar sont tantôt associés à la magie et l’ésotérisme, tantôt à la commémoration mais aussi, comme ici, aux passages épiques qui ont constitués la mémoire collective des clans.