La subtilité de la sagesse et de la musique
Dans les Hymnes homériques, Hermès s’adresse à Apollon à travers un chant magnifique :
« Celui qui, après avoir approfondi l’art et la sagesse, interroge la lyre de ses doigts légers, communique par ses chants tous les ravissements qui peuvent toucher les âmes. La lyre lui sera docile.
Si, en revanche, un ignorant, un brutal la sollicite, il n’en saura tirer que des notes fausses et des sonorités douloureuses. »
Le lien entre sagesse et lyrisme est donc très explicite dans la mythologie grecque. Seul un « sachant », une personne qui a expérimenté les arts et acquis une connaissance porteuse de sagesse a le pouvoir de communiquer par la musique avec les âmes. On comprend donc que seule une catégorie sociale initiée peut prétendre à disposer de ce pouvoir. Sans doute s’agit-il de la classe sacerdotale. Ce discours qui rentre en résonance avec les âmes humaines élève les hommes. On connaît l’impact et l’importance de la lyre dans la mythologie irlandaise (voir à ce sujet La harpe symbole de la transe) ; on peut donc supposer que la connexion avec les âmes s’établit grâce à la vibration des cordes et son harmonie renforcée par le chant. La maîtrise de cet art a le pouvoir de s’adresser à l’essence même de l’être humain. La transe semble ainsi être la conséquence d’une opération divine.
De l’Irlande à la Grèce, les peuples européens pré-chrétiens ont voué une importance capitale dans le rapport qu’ils entretenaient avec la musique. Selon les circonstances, on sait que la transe (qu’elle soit guerrière ou religieuse) permettait de communiquer directement avec les esprits et les dieux. On peut voir dans ce chant combien le profane est tenu à l’écart de cette pratique. La vulgarité et son manque de subtilité lui interdisent l’accès à une harmonie porteuse d’âme, à un langage divin.