Archive pour janvier, 2019

Le Dialogue des deux sages, de la parole druidique

Dans Le Dialogue des deux sages (pour plus de précisions sur le texte et son origine, je vous invite à prendre connaissance de l’article Le Dialogue des deux sages, introduction), nous trouvons des tournures de phrases complexes et pleines de sous entendus. En dépit du sens profond qui nous échappe partiellement aujourd’hui, faute de filiation dans la tradition druidique, nous pouvons considérer des faits comme acquis en ce qui concerne la vision sociétale de l’époque de l’apogée celtique en Europe.

En effet, dans la joute verbale qui oppose deux officiants druidiques, on trouve ce que l’on appellerait de nos jours « une promesse de bel avenir professionnel » dans l’antiquité celtique. Fechertne, le prétendant à la charge de docteur suprême de l’Ulster promet à son rival (Nede) d’être un  » panier de poésie », un « roc de docteurs », et « le bras d’un roi ».

Ces allégories représentent sans doute trois charges de la fonction druidique :

la qualité de l’éloquence, de la poésie et sans doute du chant (récitations, incantations) par la pratique bardique ;

la qualité de la médecine, des sciences (astronomiques, arithmétiques, en herboristerie, …) et de divination telle a pu l’être la pratique du vate ;

enfin, la qualité d’organiser la société dans ses juridictions, dans sa hiérarchie, dans la pratique martiale en tant que conseiller du souverain.

Le dialogue des deux sages révèle une vision de la place du druide dans la société celtique à travers des métaphores poétiques ; il laisse supposer que la plus haute fonction sacerdotale, docteur suprême, couvre les compétences subordonnées au druide comme celles dépendantes du barde et du vate.

Publié dans:Etudes, L'Antiquité |on 6 janvier, 2019 |1 Commentaire »

Un poème ésotérique

runesBracteate

L’Abecedarium nordmannicum est un poème datant du IXème siècle, rédigé dans un dialecte de haut et bas allemand avec des expressions scandinaves. Ce texte présente la particularité d’évoquer les runes dans leur ordre originel. Cette suite a donné son nom au futhark, l’abécédaire runique :
F représentant la première rune (Fehu) ; U la seconde (Uruz) ; TH la troisième (Thurisaz) ; A la quatrième (Ansuz) ; etc.

Les runes sont des signes gravés dans la pierre ou dans le bois, possédant des vertus de sentence, de commémoration, de sortilège selon les cas.

L’écriture runique fut, d’après les sagas islandaises et l’Edda de Snorri Sturlusson, l’apanage des savants et des magiciens. Considérée comme sacrée par les vikings, car instruite par le dieu Odin lui-même, elle ne pouvait être manipulée par le profane.

Le texte semble simpliste à la première lecture :

« Argent, j’ai d’abord écrit,

Aurochs ensuite,

Thurse, le troisième signe,

L’Ase est au-dessus de lui,

La roue est écrite enfin,

La torche adhère alors ensuite,

La grêle a besoin de glace,

D’année et de soleil,

Tyr, le bouleau et l’homme au milieu,

La brillante eau,

L’if tient le tout. »

Pour le runologue débutant, il apparaît que chaque vers porte le nom d’une rune et est déclamé dans l’ordre du futhark. L’argent correspond à la rune Fehu ; l’auroch à Uruz ; le Thurse est un géant associé à la rune Thurisaz ; l’Ase est la catégorie supérieure des dieux et représente la rune Ansuz ; l’ensemble du poème parcourt ainsi seize signes runiques.

On peut penser qu’il s’agit d’un moyen mnémotechnique pour intégrer facilement l’enseignement de ce langage.

A bien y regarder et en parcourant le poème attentivement, on est frappé de déceler un deuxième sens. La lecture en profondeur du poème traduit une vision mythologique et spirituelle du paganisme de l’Europe du nord. L’expression « L’Ase est au-dessus de Thurse » renvoie à la vision païenne d’un univers divisé en plusieurs mondes superposés ; le monde des Ases représente bien le monde d’en haut chez les Norrois, tandis que celui des géants, un monde inférieur. De la même façon, dans la cosmologie nordique, il apparaît que le monde dit « du milieu » représente la terre des hommes, évoquée dans le poème par les mots «  l’homme est au milieu ». On pense aussi au pilier cosmique Yggdrasill, l’axe du monde, représenté par un arbre géant qui soutient toute chose dans l’univers, quand on arrive à la dernière ligne : « L’if tient le tout ».

Encore une fois, on ne peut qu’être subjugué par la connaissance et l’érudition des peuples des sociétés pré-chrétiennes, d’autant que leur enseignement fut pour l’essentiel transmis oralement.

Publié dans:Etudes, Le Moyen-Age |on 1 janvier, 2019 |Pas de commentaires »

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