Archive pour août, 2017

La poésie des objets

En étudiant la mythologie des dieux indo-européens, on se rend compte des attributs communs et des fonctions similaires, comme l’a démontré remarquablement Georges Dumézil.

Par exemple, il ressort que les dieux celtes et germains (pour mieux dire germano-scandinaves) possèdent des objets symboliques semblables. Ainsi dans la tribu irlandaise de la déesse Dana, on trouve pour le dieu Dagda un chaudron d’abondance contenant une nourriture inépuisable à l’image du dieu celte continental Sucellos. Les deux sont pourvus du maillet possédant le pouvoir de donner la vie ou la mort selon le côté où il frappe. Chez les peuples norrois c’est Thor qui est armé du marteau. Celui-ci est le symbole du tonnerre, en conséquence de la pluie et de la fertilité.

Il y a également l’arme de guerre par excellence : la lance. Celle du dieu Odin chez les scandinaves et celle de Lug chez les Celtes. Cette lance magique a le pouvoir de rendre invincible son possesseur, et permet de jeter un sort lorsqu’on la lance en préambule du combat pour s’approprier la victoire.

Chacun de ces objets est désigné par des métaphores ou dans certains cas son histoire fait écho à sa fonction. Le chaudron celte d’abondance fut apporté de Murias, une des îles au nord du monde, durant le règne du druide Semias (« subtil » en gaélique), un des quatre druides primordiaux de la tribu de Dana ; il est donc rattaché à la magie et à l’ésotérisme. On peut en déduire que son histoire est liée aux connaissances druidiques du sens de la vie.

Le symbole du marteau chez les vikings est Mjölnirr qui signifie l’éclair. Certains chercheurs l’ont traduit comme « destructeur », « arme foudroyante de couleur blanche », et « concasseur ». Pour Dagda comme pour Thor, c’est une arme destructrice. Toutefois la subtilité de la fonction de résurrection pour les Celtes est assez singulière et ramène encore à un sens perdu de la doctrine druidique.

La lance chez le dieu Norrois Odin est appelée Gungnir, c’est à dire le « chancelant » ; il faut peut-être voir dans cette image la victime saisie par la projection de l’arme. Pour le dieu irlandais Lug, la lance se nomme Gea Assail ou Ar-éadbair en gaélique ; ces deux expressions sont inexpliquées ; sans doute s’agit-il d’expressions relatives à l’image de sa fonction.

En élargissant la recherche à l’histoire, on se rend compte que les grands guerriers, ceux qui ont marqué l’histoire par leurs hauts faits, nommaient leurs armes par des désignations imagées. Ainsi dans les sagas islandaises, on voit le héros Egill Skallagrimsson appeler une de ses deux épées « Nadr », ce qui signifie « vipère », celle qui mord ses victimes. On trouve aussi une expression très explicite pour une autre épée : « Dure-entaille » ; c’est une des épées magique de la mythologie celtique qui deviendra Excalibur dans la légende arthurienne. Sans doute s’agit-il de la version postérieure à l’antiquité archaïque du dieu Nodons (Nuada en irlandais) dont l’attribut principal est son épée qui a le pouvoir de trancher le fer et l’acier ; elle luisait en permanence d’une lueur blanche, ce qui lui valut le nom de « Claíomh Solais », c’est à dire « épée de lumière » en gaélique.

Les images qui nous sont parvenues sont riches et narratives. Elles s’inscrivent dans le récit de l’épopée et démontrent encore toute la richesse et la culture des hommes d’armes depuis l’antiquité jusqu’au moyen-âge païen.

 

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