Archive pour mars, 2016

La montagne animée

L’idée d’un habitant au coeur de la montagne défiant le temps est récurrente dans les croyances païennes européennes.

On en trouve traces dans plusieurs récits, notamment dans les fameuses Sagas islandaises, mais aussi dans le Landnamabok (le livre de la colonisation de l’île par les vikings) ; elles apparaissent également en Germanie continentale avec les récits de Frédéric Barbe Rousse qui attend son heure dans la région de l’Untersberg, Frédéric II dans le Kyffhäuser, Widukind dans la montagne du bord de la Weser.

L’inhumation dans des tumulus de formes diverses en Europe depuis le néolithique est répandue. Chez les Germains et Norrois, cette pratique perdure au Moyen-Age. Le tumulus est un tertre funéraire dans lequel initialement une famille était inhumée. A la fin du paganisme, le tumulus semble avoir été essentiellement la tombe du chef ou du roi.

L’idée du mort dans le tumulus suggère celle des morts qui habitent à l’intérieur des montagnes. La croyance en une vie après la mort est effectivement un thème majeur des cultes archaïques.  Ainsi il apparaît logiquement que l’enracinement d’un personnage illustre à une montagne est la mémoire de coutumes funéraires issues d’un paganisme qui a profondément marqué la mémoire collective.

Une image poétique nous est donc parvenue à partir d’un mode de vie et de croyances quasiment oubliés.

Publié dans:Etudes, Le Moyen-Age |on 18 mars, 2016 |Pas de commentaires »

Une structure élitiste

Nous l’avons déjà démontré à plusieurs reprises, les kenningar apparaissent dans des structures de phrases travaillées et hermétiques, laissant supposer une éloquence élitiste.

Le scalde Hallfredr Ottarsson Vandraedaskald écrit par exemple :

« Celui qui apaise la faim de la sterne du vacarme de l’éclat de la bête de Heiti. »

Comme souvent dans la rhétorique des poètes islandais, le décryptage doit se faire par la fin de la phrase.

« La bête de Heiti » désigne le bateau car Heiti est un roi de mer légendaire et la « bête » son attribut principal.

« L’éclat du bateau » est une métaphore visuelle pour évoquer le bouclier, car celui-ci était accroché au bordage des embarcations et contenaient des pièces métalliques (cerclage et umbo par exemple) et des peintures claniques.

« Le vacarme du bouclier » renvoie au tumulte de la bataille et désigne par extension le combat en lui-même.

« La sterne » (de la bataille) fait référence à l’oiseau omniprésent sur les champs de bataille et souvent évoqués par les scaldes : le corbeau.

« Celui qui apaise la faim du corbeau » est une métaphore récurrente en poésie viking pour le guerrier.

D’autres exemples aussi complexes abondent dans les sagas. Chez Thordr Saereksson, on trouve la phrase : « Celui qui brandit le feu de la tempête de la sorcière de la lune de Hler du cheval des hangars à bateaux » pour exprimer la notion de guerrier !

Ce genre de phrases illustrent le degré de raffinement et de complexité de l’art des poètes islandais. Sans doute cet art n’était-il pas leur particularité mais représentait-il un héritage ancestral développé sur de plus grandes zones géographiques, mais qui aura perduré plus longtemps chez les peuples christianisés tardivement. La structure métrique, le désordre des mots, les kenningar à décrypter participent à l’élaboration mystérieuse et sans doute représentent-ils un genre de poésie aristocratique.

Publié dans:Etudes, Le Moyen-Age |on 5 mars, 2016 |Pas de commentaires »

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